Touba, aujourd’hui vaste cité spirituelle, fut d’abord un songe solitaire. Selon la tradition orale, c’est au cœur de la brousse, dans une forêt dense aux arbres centenaires, que Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké s’arrêta un jour, sa canne à la main, et dit : « C’est ici Touba. » Le nom même, dérivé de l’arabe ṭūbā, qui signifie « félicité » ou « bonheur éternel », est évoqué dans le Coran comme un lieu paradisiaque.
Cette terre, choisie dans la discrétion, loin des regards du pouvoir colonial, devint le socle d’un projet mystique et civilisationnel. Cheikh Ahmadou Bamba voulait y édifier une ville dédiée à Dieu, libérée de la tyrannie, de la corruption et de la violence. Une cité du travail, de l’adoration et du savoir.
Au fil des années, Touba devint un pôle d’attraction. Des disciples vinrent s’y établir. Des daaras s’y créèrent. L’agriculture y prospéra. L’esprit de jihad bil-nafs – le combat contre soi-même – imprégna l’organisation sociale.
Le mausolée du fondateur, érigé après son rappel à Dieu en 1927, devint un symbole d’espérance pour des générations de talibés, de marchands, de paysans et d’érudits. Aujourd’hui, Touba rayonne bien au-delà du Sénégal. Elle incarne une ville sainte africaine, enracinée dans les valeurs du soufisme et tournée vers l’avenir.