C’est une scène désormais familière pour les habitants de Gran Canaria, l’une des principales îles de l’archipel espagnol des Canaries : des Mourides vêtus de grands boubous, regroupés dans des ruelles ou dans de petites maisons aménagées, répètent inlassablement les vers du Xassaïd. Loin de Touba, la ferveur ne faiblit pas.
À Gran Canaria, les Dahiras se sont progressivement structurés autour d’une forte cohésion communautaire. Dans cette île à la fois touristique et isolée, les Mourides venus du Sénégal, mais aussi de la sous-région, perpétuent les enseignements de Cheikh Ahmadou Bamba avec rigueur. Ici, pas de grands espaces ni de mosquées imposantes, mais une piété discrète et constante, rythmée par les soirées de récital, les berndés organisés entre frères, et les actions sociales.
Le Dahira local s’est même récemment doté d’un cadre de coordination chargé de faciliter les initiatives communautaires : qu’il s’agisse de soutien aux nouveaux arrivants, de cotisations pour le Magal, ou d’envois de contributions vers Touba. La fraternité est le socle du quotidien.
Ceux qui vivent à Gran Canaria racontent une insertion parfois difficile, marquée par des barrières linguistiques, le coût de la vie et les lourdeurs administratives. Mais ils disent aussi leur soulagement de retrouver une famille spirituelle soudée. « C’est grâce au Dahira que je n’ai jamais perdu mes repères », confie un talibé rencontré lors d’un récital nocturne.
En somme, Gran Canaria témoigne que le mouridisme ne connaît pas de frontière. Même dans les lieux les plus inattendus, le message du travail, de la foi et de la solidarité continue de résonner.